DPE : le diagnostic de performance énergétique se rénove
Le diagnostic de performance énergétique (DPE) qui est en vigueur à l’heure actuelle présente trop de lacunes pour être conservé tel quel : trop de diagnostics vierges, insuffisants voire peu fiables. La volonté de refonte s’est concrétisée avec la loi ELAN de 2018, précisée par deux décrets de décembre 2020 (les arrêtés sont en cours d’élaboration) pour une entrée en vigueur prévu le 1er juillet 2021. Des délais qui changent, un format différent, une nature juridique renforcée : autant d’éléments qui méritent des éclaircissements.
Une rénovation par étapes
Le Conseil d’Etat dans sa fonction de recommandation s’en est ému encore récemment, il constatait et regrettait : « la multiplication des contraintes imposées aux propriétaires immobiliers, en particulier aux copropriétaires, conduisant à des dépenses obligatoires »[1]. La Haute-juridiction a lancé un avertissement aux professionnels. Une invitation à une plus grande transparence. Ces avis ont été formulés à la suite de l’approbation par le Conseil des ministres de la loi Climat, une loi de plus s’intéressant au diagnostic de performance énergétique.
Ce DPE est au cœur d’une machine complexe, en même temps qu’il évolue, il fait évoluer des législations qui dépendent de lui. Avant d’en arriver à ce point, il convient de s’arrêter sur les principaux objectifs recherchés par le législateur avec ce nouveau DPE :
- Simplifier la méthode d’évaluation des bâtiments ;
- Augmenter la qualité des données, avec un diagnostic plus représentatif de la performance du logement (prise en compte de nouveaux usages, équipements, etc.) ;
- Renforcer le DPE en lui conférant une opposabilité juridique ;
- Rassembler en une nouvelle étiquette « énergie » les éléments qui témoignent d’un niveau de consommation d’énergie et les éléments à propos des émissions de gaz à effet de serre ;
- Accroître la lisibilité avec la refonte du design afin que l’étiquette gagne en informations et en lisibilité (apparition des montants théoriques des factures énergétiques, etc.).
Le renforcement des sanctions
C’est sans doute le point fondamental : l’opposabilité du DPE. Jusqu’à présent, les pouvoirs publics n’avaient pas donner à ces DPE une force juridique importante. S’il devait être présenté au moment de l’achat d’une maison, à côté des nombreux autres diagnostics obligatoires[2], les sanctions en cas de défaillance n’étaient pas importantes puisque le DPE ne consistait qu’en une information, ni plus ni moins. La solution avait d’ailleurs été confirmée par la jurisprudence :
« Mais attendu que, selon le II de l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation, le DPE mentionné au 6° de ce texte n’a, à la différence des autres documents constituant le dossier de diagnostic technique, qu’une valeur informative »[3].
Ce jugement, comme tous les autres rendus à ce sujet, a le mérite de mettre en lumière un fait important : même informatif, ce diagnostic est un élément de négociation du prix. Afin de consolider cette position, au 1er juillet 2021, si un diagnostic de performance énergétique fourni au cours d’une vente est erroné, le vendeur pourra être tenu pour responsable. Celui-ci pourra se retourner contre le diagnostiqueur qui lui a fourni les mauvaises informations. Il existe un second effet, qui mettra plus de temps à se mettre en place, une fois ce DPE nouvelle génération consolidé, il pourra servir de base juridique pour interdire les mises en location de toutes les « passoires énergétiques » dès 2028.
La durée de validité du DPE
Avec ces différents changements, il était assez évident que les durées de validité seraient également concernées. Un décret de 2017 est venu modifier l’article D. 134-4-2 du Code de la construction et de l’habitation. Le but recherché par les pouvoirs publics n’est pas tellement de remettre en cause la durée de validité du DPE, qui était de 10 ans et qui le demeurera, mais de ne pas laisser des DPE « ancienne version » valables trop longtemps.
Ainsi, au 1er juillet 2021 :
- Les diagnostics réalisés entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017 demeureront valables seulement jusqu’au 31 décembre 2022 ;
- Les diagnostics réalisés entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 seront valables jusqu’au 31 décembre 2024.
- Les diagnostics réalisés à partir du 1er juillet 2021 seront valables 10 ans.
Pour ceux qui sont intéressés par un bilan de leurs installations et seraient tentés de faire un DPE volontaire, il serait plus avantageux d’attendre quelques mois encore avant de le réaliser.
[1] https://www.conseil-etat.fr/ressources/avis-aux-pouvoirs-publics/derniers-avis-publies/avis-sur-un-projet-de-loi-portant-lutte-contre-le-dereglement-climatique-et-ses-effets
[2] https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037671247?etatTexte=VIGUEUR&etatTexte=VIGUEUR_DIFF
[3] https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/troisieme_chambre_civile_572/983_21_43935.html